Pour ce 300ème article, il n'y aura pas de concours, mais un article choc qui pourra peut-être vous apporter beaucoup plus que des cadeaux: le simple fait de rester en vie.
Lundi, je vous ai demandé si vous aimiez les tatouages au henné (53% de oui pour 30 votants) et si vous pensiez qu'ils peuvent être dangereux (57% de oui sur 30 votes). J'en ai fait un il y a plus de 6 ans et mon corps me le rappelle encore. Ce qui va suivre est une histoire personnelle que j'ai essayé de vous synthétiser un max pour ne perdre personne en cours de route car ma mésaventure pourra peut-être vous servir.
2004: J'ai 16 ans et je veux un tatouage au henné noir. Mon père aussi, donc on choisit soigneusement une boutique ayant pignon sur rue avant de se faire tatouer. J'ai choisi un papillon en bas du dos, il est superbe et j'en suis heureuse quelques heures. Jusqu'à ce que je sente mon tatouage me démange, je ne peux m'empêcher de me gratter ce qui me permet de découvrir des minuscules petits boutons tout le long du dessin au henné. Je suis allergique.
Mon père s'étant fait tatouer juste avant moi avec la même mixture, il s'avère que c'est moi qui ai un problème avec ce composé qui est souvent mélangé au henné afin de renforcer sa teinte et sa fixation: la ParaPhénylène Diamine, un diaminobenzène bon marché. Cette allergie n'est pas rare et a souvent une action sur le long terme.
2006: A l'époque, je pensais être seulement allergique au henné. J'ai donc utilisé sans scrupule des colorations capillaires de temps en temps, de marques reconnues, disponibles en grandes surfaces ou en salon.
A chaque fois, un jour après l'application, mon cuir chevelu me démangeait et je le grattais dès que je me retrouvais toute seule. Jusqu'à ce que j'arrive à me contrôler et à m'interdire de gratter, comme je le fais depuis toujours avec les piqûres de moustiques et d'insectes en général: tu grattes, ça fait du bien sur le moment puis ça devient désagréable.
2009: Je suis rousse, mais l'effet racine commence à sa faire voir. Je veux donc estomper cette couleur trop visible avec une coloration temporaire que ma mère m'applique à la maison. Au bout d'une demi-journée, mon cuir chevelu me démange comme jamais aussi je me laisse tenter par l'envie de le gratter. Les petits boutons qui apparaissent déversent une sorte de pus jaune à chaque fois que je gratte. Moi qui déteste tout ce qui est croûte, je suis servie: méthodiquement, je tâte mon cuir chevelu afin de virer les croûtes sèches qui se forment, d'un coup d'ongles. Un jour et demi plus tard, je me réveille en pleine nuit, je me sens vraiment bizarre. Je reste dans le noir et m'assoie sur mon lit: ma tête me semble lourde, mes traits sont comme tirés. J'allume la lumière et je reste muette de terreur: je ressemble purement et simplement à Elefant Man. Mon visage est totalement déformé, j'ai un cou de taureau, mes cheveux sont collés par le pus. Le lendemain, passage en urgence chez le docteur: j'ai un oedème de Quincke, c'est à dire un énorme gonflement de la peau et des tissus muqueux et sous-muqueux. Le médecin me précise que j'aurais pu en mourir si le gonflement s'était déplacé au niveau de ma gorge, créant un choc anaphylactique et une asphyxie. On me prescrit des corticoïdes et des anti-histaminiques contre cette méga-réaction allergique. Je retrouve un visage plus ou moins normal en 4-5 jours, pendant lesquels je ne bouge pratiquement pas à cause de la forte pression dans ma tête et de son poids. D'ailleurs, pour l'anecdote, moi qui suis myope, je ne peux même pas mettre mes lunettes pour regarder la TV tant ma tête est grosse.
C'est vital, j'ai beau avoir de plus en plus de cheveux blancs (alors que je n'ai que 22 ans), je ne toucherais plus jamais à une coloration capillaire synthétique de ma vie. A force de sensibiliser ma peau au PPD qu'elles contiennent, mon corps a fini par crier stop à travers cet oedème de Quincke. Je ne me ferais plus tatouer au henné noir non plus.
Mais j'ai beau me tenir éloignée de ces 2 types de produits, si je vous en parle aujourd'hui, c'est parce que cette fichue allergie continue de me gâcher la vie. A l'heure où je vous écris, j'ai une furieuse envie de me gratter jusqu'au sang le ventre car la PPD est aussi présente dans les caoutchoucs et textiles, entre autres. Il m'arrive de faire une réaction allergique à un vêtement que j'ai déjà porté à maintes reprises, comme ça, parce qu'il est en synthétique, qu'il est coloré et qu'il fait chaud ou alors que je suis sensibilisée par un rhume ou autre. Surtout au niveau des sous-vêtements (contact direct et persistant avec la peau, et élastiques nombreux). Bref, vous voyez le genre. Là, c'est avec un chouette caraco...
Donc, on en retient quoi de mon histoire?
1- Il faut éviter les tatouages au henné noir, principe de précaution oblige. (Rares sont ceux qui sont effectués avec de l'extrait naturel d'indigo au lieu de la PPD.)
2- Si jamais vous ressentez des picotements ou des démangeaisons suite à l'utilisation d'un produit cosmétique ou autre, surtout, ne pensez pas que vous pourrez vous y habituer, car votre corps en décidera autrement.
Et, pour finir, juste parce que cela m'a fait enrager à l'époque: suite à ma coloration maison des cheveux ayant entrainé mon oedème de Quincke, "le pire", c'est que c'était une coloration temporaire si peu dosée en pigments qu'elle n'a eu aucun effet sur mes racines et encore moins sur mes longueurs!